Par UJA de Paris, 20 November 2023

rapport

LUJA Octobre 2023

Lire le rapport

Clémence Marolla, responsable de la Commission Numérique de l’UJA de Paris, s’interroge sur l’application de la loi relative aux influenceurs, entrée en vigueur en juin dernier, aux avocats.

Quel est le point commun entre Booba et Squeezie ?

Ils ont tous deux joué un rôle autour de la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 qui a révolutionné le paysage de l'influence commerciale en France.

Ce texte, co-construit en collaboration avec les acteurs de l’écosystème vise à réguler les activités des influenceurs et prévenir les abus.

Adieu le drop shipping illégal et les placements de produit dissimulés.

C’est quoi un influenceur ?

La loi apporte une réponse claire à cette question, bien que le consensus n’ait pas été simple à atteindre. Le texte prévoit qu’un influenceur désigne : « Les personnes physiques ou morales qui, à titre onéreux, mobilisent leur notoriété auprès de leur audience pour communiquer au public, par voie électronique, des contenus visant à faire la promotion, directement ou indirectement, de biens, de services ou d'une cause quelconque exercent l'activité d'influence commerciale par voie électronique. »

Quatre critères définissent donc un influenceur :

  • Utilisation de sa notoriété ;
  • Diffusion de contenus en ligne ;
  • Promotion directe ou indirecte de biens, services ou cause ;
  • Avantage en retour : soit en nature, soit rémunéré.

Un avocat peut-il être un influenceur ?

Selon cette définition, les avocats actifs sur les réseaux sociaux pourraient être considérés comme des influenceurs, en fonction de sujets sur lesquels ils prennent la parole. Des blogs recensent même le top des influenceurs avocats en France.

Cependant, la frontière entre influence et publicité est fine, c’est d’ailleurs tout l’enjeu de cette nouvelle législation. Or, les avocats doivent respecter leur serment y compris en ligne, notamment en ce qui concerne le contenu de leurs messages.

Si un avocat prend la parole sur un réseau social en contrepartie d’un avantage quel qu’il soit, il y a donc un gros risque au regard du principe d’indépendance de l’avocat.

Le vade-mecum du Barreau de paris sur la communication numérique de l’avocat considère d’ailleurs que « L’avocat ne peut, en effet, sur son réseau social professionnel renvoyer à des comptes ou des sites n’ayant pas de lien avec la profession ou faire la promotion de sociétés commerciales n’ayant pas de lien avec son activité ».

Alors que la pratique usuelle des influenceurs est de taguer la marque ou la cause à laquelle leur message est dédié, il serait donc en théorie interdit pour un avocat de faire de même.

Sous la réserve d’une petite brèche : l’article 10.5 du RIN autorise les avocats à insérer sur leur site des encarts ou bannières publicitaires s’ils sont en lien avec ceux de la profession.

Cette règle serait-elle transposable aux réseaux sociaux pour permettre à un avocat de devenir l’influenceur d’un réseau ou syndicat d’avocats ?

La frontière entre influence et publicité est fine, c’est d’ailleurs tout l’enjeu de cette nouvelle législation.

La ligne est également fine pour les avocats lobbyistes dont le statut est reconnu par le RIN. Prendre la parole sur un sujet en faveur de l’un de leurs clients pourrait-il faire l’objet d’une prestation rémunérée soumise à la loi sur l’influence ?

Pour autant, les avocats sont encore timides sur les réseaux et ce n’est pas demain que Dalloz, Lamy et les autres pourront payer des prestations à un avocat pour qu’il parle d’eux.

Par Clémence Marolla, Avocate au barreau de Paris, Responsable de la Commission Numérique de l’UJA de Paris

L’UJA remercie ses partenaires: